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Immobilier locatif : les 3 questions que pose la fin du Pinel

11/09/2023
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Le gouvernement a indiqué dans le cadre du CNR Logement son souhait de mettre un point final au dispositif d'immobilier locatif Pinel. Pour les investisseurs louant déjà ainsi un bien, comme pour ceux désireux de se lancer dans les mois à venir, la suppression de cet avantage fiscal pose de nombreuses questions. Faut-il maintenir son projet ? Vais-je perdre mon avantage fiscal ? Tous les « Pinel » sont-ils concernés par ce projet de suppression ? Réponses d'experts.

Fin de parcours pour le plus célèbre dispositif d'investissement locatif défiscalisant. Dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR) consacré au logement, le gouvernement a indiqué sa volonté de ne pas prolonger le Pinel, l'exécutif préférant mettre l'accent sur le logement locatif intermédiaire.

Résultat, le gouvernement ne prolongera pas le dispositif dans les prochaines lois de finances. Il s'éteindra fin 2024. Mais les rouages du Pinel sont multiples. L'avantage fiscal ne s'obtient pas en une fois, il est échelonné dans le temps. Et, dans les faits, il n'y a pas un seul mais plusieurs dispositifs Pinel coexistants. Le point sur les principales questions entourant la fin de cette niche fiscale.

Tous les « Pinel » sont-ils concernés par la fin du dispositif ?

Le Pinel est une sorte de contrat qu'un particulier désireux d'investir dans la pierre passe avec la collectivité. En échange de l'achat d'un bien dans une zone tendue, loué pendant 6 à 12 ans à un ménage aux revenus modestes et à un loyer encadré, l'investisseur obtient une réduction d'impôt. Cette dernière ne se matérialise pas par une baisse de l'assiette d'imposition mais bien par une diminution directe de la facture fiscale. Voilà la règle générale. Mais, en pratique, il existe des nuances dans le dispositif selon la nature du bien acquis ainsi que son emplacement.

En effet, à l'automne 2021, afin de soutenir la construction de logements aux meilleurs standards énergiques et avec des critères qualitatifs précis (surface minimale, nombre de pièces minimal, présence d'un extérieur), le gouvernement a décidé de réserver les taux de réduction d'impôt les plus élevés aux ménages achetant des logements respectant ce cahier des charges.

Les investisseurs se lançant dans une opération dite «Pinel +» avant fin 2024 peuvent en conséquence viser une baisse d'impôt atteignant 21 % du coût de l'acquisition (soit 42.000 euros pour un logement acquis 200.000 euros) répartie sur 12 ans de location. Attention, l'avantage fiscal est calculé sur un montant de 5.500 euros du mètre carré seulement et pour un investissement maximum de 300.000 euros.

Les investisseurs portant leur dévolu sur un immeuble ne respectant pas les contraintes architecturales et environnementales du «Pinel +» restent sur le Pinel classique dont l'avantage fiscal a été raboté en 2023. Pour les Pinel signés en 2023, le taux de réduction d'impôt maximal, pour 12 ans de location, s'élève à 17,5 %. Il passera à 14 % en 2024 . Pas de traitement de faveur pour ces sous-catégories de Pinel, « dans les deux cas, l'échéance est prévue fin 2024 », confirme le cabinet d'Olivier Klein, ministre délégué chargé de la Ville et du Logement.

Sans être véritablement un dispositif distinct, il existe également une expérimentation en Bretagne d'un Pinel avec un fonctionnement singulier. Celle-ci a été introduite par la loi de finances pour 2020, d'abord pour 2 ans, avant d'être prolongée jusqu'au 31 décembre 2024. Les taux de défiscalisation sont les mêmes que ceux décrits ci-avant. En revanche, les règles d'éligibilité sont différentes. « Le Pinel « breton » renvoie plutôt à une question liée à la définition du zonage éligible au dispositif », explique Didier Bellier-Ganière, délégué général de la Fédération des promoteurs immobiliers de France (FPI France).

Concrètement au lieu d'être défini au niveau de l'Etat central, il revient au préfet de préciser le périmètre du territoire éligible à la loi Pinel. Il peut ainsi décider de rendre compatible une commune entière ou seulement une partie de celle-ci.

Si la dimension fiscale de ce « Pinel breton » n'a, comme l'ensemble du dispositif Pinel, plus les faveurs de l'exécutif, le gouvernement se dit sensible à l'échelon local de prise de décision. « Sa généralisation reste à l'ordre du jour des travaux sur le zonage et permettrait notamment de mieux cibler localement le PTZ et/ou le logement locatif intermédiaire en fonction de la réalité locale des besoins », indique « aux Echos » le ministère du Logement.

Enfin, codifié comme le Pinel par l'article 199 novovicies du Code général des impôts, le dispositif Denormandie est-il aussi sur la sellette ? Ce dernier permet d'obtenir la même réduction d'impôt que le Pinel mais à condition d'investir dans un quartier ancien dégradé de certaines communes, notamment labellisées Coeur de ville, et de réaliser dans le logement des travaux représentant au moins 25 % du coût total de l'opération.

« S'agissant du Denormandie dont l'échéance est prévue fin 2023, une évaluation est en cours pour remise d'un rapport au Parlement avant fin septembre, afin d'alimenter les débats en PLF [projet de loi de finances, NDLR]. Cette évaluation permettra notamment d'orienter la décision de prolonger ou non le dispositif, dans ses modalités actuelles ou avec des évolutions, sachant que contrairement au Pinel il répond à des enjeux de rénovation du parc ancien », souligne le ministère.

Les locations Pinel en cours sont-elles compromises ?

« Par principe, une loi de finances ne rétroagit pas. S'il était existant l'année de souscription, le régime s'applique jusqu'à son terme », explique Charles-Edouard Bourget, notaire à Paris.

Les ménages s'étant saisis du dispositif Pinel les années précédentes n'ont donc a priori aucune crainte à avoir quant à la possibilité d'obtenir la réduction d'impôt sur la durée espérée, même ceux partant pour 12 ans de location en 2024.

Une illustration de ce mécanisme a été donnée lors du passage du Pinel au « Pinel + ». « L'année de souscription détermine les taux de réduction d'impôt applicables. Cela n'a pas été remis en cause par les réformes successives de la loi Pinel, note ainsi Benoit Vieux, également notaire à Paris. Simplement, on arrêtera de signer de nouveaux Pinel à partir du 1er janvier 2025 », poursuit-il.

La mort annoncée du dispositif Pinel n'est pas l'unique changement auquel sont confrontés les investisseurs locatifs. Ainsi, depuis le 24 août 2022 , les loyers des logements dont le diagnostic de performance énergétique (DPE) les classe en F ou G ne peuvent plus être augmentés en cours de location comme au renouvellement du bail.

De plus, depuis cette année, les pires passoires thermiques doivent progressivement être retirées du marché locatif si les propriétaires ne réalisent pas des travaux améliorant leur DPE. Au 1er janvier 2025, l'interdiction de mise en location concernera les logements G, puis les F en 2028, et enfin les E en 2034.

Souvent étiquetés par leurs détracteurs comme des logements de piètre qualité, les biens loués en Pinel encourent-ils de risque ? « Le dispositif d'investissement locatif Pinel remonte à 2014. Les promoteurs devaient déjà satisfaire la norme de construction RT 2012. Donc, sauf malfaçon, il ne doit pas y avoir de passoires thermiques », indique Benoit Vieux.

« Il n'y a aucune différence entre un logement Pinel et un logement du même programme vendu comme une résidence principale. Un promoteur ne peut pas faire de refus de vente. Or, quand des futurs acquéreurs se présentent soit via des réseaux bancaires, soit parce qu'ils ont vu un panneau publicitaire, soit par l'intermédiaire de plateformes immobilières, les services commerciaux des promoteurs ne savent pas s'ils veulent acheter pour eux ou pour louer », renchérit Didier Bellier-Ganière.

« Si vous avez un problème avec l'immeuble, ce n'est pas à cause du dispositif Pinel mais à cause d'un promoteur défaillant. Le neuf est soumis à des normes et réglementations thermiques élevées. Sur les 15 dernières années, vous n'avez pas un immeuble neuf avec un DPE en dessous de C », souligne également Kurt Vural, du cabinet de conseil patrimonial Selexium.

Dans le détail, il reste possible que certains lots d'un immeuble en A ou B ressortent avec un DPE individuel plus faible compte tenu de leur exposition et de leur emplacement. « Mais vous n'avez pas de passoires thermiques dans un immeuble neuf », assure Kurt Vural.

Faut-il profiter des dernières opérations Pinel ?

Jusqu'à fin 2024, le dispositif Pinel restera dans la palette des investissements locatifs. Pour Kurt Vural, il y aura des opportunités à saisir. En effet alors que les acteurs de l'immobilier sont confrontés à la désolvabilisation des ménages à cause de la remontée des taux, « je ne vous cache pas que les promoteurs ont besoin d'accélérer la commercialisation. Il y a déjà des offres comme des réductions de prix ou des frais de notaire offerts », explique Kurt Vural. « Nous voyons des baisses de prix pour sortir les queues de programme. Ceux qui ont la capacité d'acquérir, de faire une défiscalisation, vont en profiter », observe également Benoit Vieux.

Mais ce coup de projecteur sur la fin du Pinel fait peser un risque, celui d'un effet de « rush » ou ruée vers ce dispositif, avec le danger que ces derniers investisseurs en Pinel mettent en location puis revendent leur bien tous au même moment. Ils risquent, de fait, de rencontrer des difficultés à trouver des locataires si la demande locative n'est pas suffisante et de devoir revendre leur logement à un prix déprécié compte tenu de la concurrence.

« Sur 5.000 lots gérés dans le cadre d'un investissement locatif avec défiscalisation, je n'ai jamais eu à traiter un particulier ne parvenant pas à respecter le délai de 12 mois maximum de mise en location après l'achèvement du bien », indique Kurt Vural. Pour ce dernier, « le vrai sujet concerne davantage les futures reventes ». En la matière, les investisseurs ont encore peu de recul car le dispositif Pinel a débuté en 2014. A raison d'un engagement minimum de 6 ans, les premières reventes sont récentes et intervenaient jusqu'il y a peu dans un environnement favorable avec des prix de l'ancien au plus haut et des taux d'intérêt au plus bas.

La donne a complètement changé depuis 18 mois. Les investisseurs locatifs doivent en conséquence se montrer particulièrement vigilants sur l'emplacement et la qualité du logement acquis. « Il faut que les ménages aillent voir l'immeuble pour vérifier que le marché locatif est au rendez-vous avec une vision à moyen ou long terme. L'avantage fiscal a une date de fin connue, mais le bien acheté restera un actif dans le patrimoine de l'investisseur », rappelle Charles-Edouard Bourget.

A fortiori, dans un contexte de marché baissier, les ménages doivent tenir compte des frais annexes à l'investissement Pinel afin d'évaluer sa rentabilité. En effet, l'achat d'un logement offrant une réduction d'impôt s'inscrit souvent dans une logique patrimoniale suggérée par un intermédiaire, qu'il soit bancaire ou conseiller en gestion de patrimoine. Dès lors, en plus du coût d'acquisition et des frais de notaire, l'investisseur supporte aussi les commissions perçues par cet intermédiaire. Historiquement, il y a eu quelques abus aboutissant au plafonnement de ces frais à 10 % du prix de revient du logement.

Par Marie-Eve Frénay, Les Echos - Publié le 12 juin 2023 à 07:30 - Mis à jour le 13 juin 2023 à 14:28

Source : https://www.lesechos.fr/patrimoine/immobilier/immobilier-locatif-les-3-questions-que-pose-la-fin-du-pinel-1951216

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